Cette section réunit certains projets exemplaires illustrant ma pratique, présentés ici dans un ordre arbitraire, absolument pas chronologique. La liste complète de mes références se trouve plutôt ici.
Accès direct aux projets évoqués dans cette page :
- Musée La Piscine
- Villa Méditerranée
- Bank Al-Maghrib
- Museon Arlaten
- Musées départementaux des Alpes de Haute-Provence
Musée La Piscine
Projet
De septembre 2017 à octobre 2018, j’ai travaillé en étroite collaboration avec le musée La Piscine à Roubaix, pour concevoir et encadrer la réalisation des dispositifs numériques devant servir la médiation d’une nouvelle extension – 2000 m2 dédiés aux expositions permanente et temporaires. Cette mission a donné lieu à un article spécifique, qui la documente.
Debrief
A l’opposé d’un autre projet évoqué sur cette page, qui aura duré plusieurs années, celui-ci fut très rapide et, au regard de son envergure, plutôt dense. Tous mes interlocuteurs étaient par ailleurs réquisitionnés par divers chantiers liés à la réouverture et il fallu composer avec des disponibilités réduites.
Mais j’ai trouvé dans cette maison une qualité rare, identifiée chez ceux que j’appelle les finisseurs – à savoir les pragmatiques qui abordent les problèmes frontalement, avec ce qu’il faut d’exigences et de résilience pour obtenir les compromis les plus satisfaisants dans les délais de décision les plus courts.
In fine la présence numérique dans ces espaces tout neufs reste discrète et je n’ai eu connaissance d’aucune presse à ce sujet. Mais il me semble que nous (le musée, les prestataires et moi) avons produit exactement les pièces du puzzle que dessinait en creux la médiation physique, pour un sentiment global de complétude plutôt gratifiant.
Equipe
assistant à maîtrise d’ouvrage : Pierre Lavoie
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Villa Méditerranée
Projet
Fin 2012 j’ai constitué un groupement sous ma direction avec la société ETC (matériels audiovisuels) et l’association Videospread (réseau d’artistes numériques) pour répondre à un appel d’offre de la Villa Méditerranée (dont j’ai signé le site Web avant de quitter Hyptique mais qui a changé de vocation depuis) concernant une « projection monumentale ». La Villa fait partie des équipements culturels mis en œuvre à l’occasion de Marseille-Provence 2013 capitale de la culture. Elle est sortie de terre en même temps et juste à côté du MuCEM (dont on a beaucoup plus parlé) sur le quai J4, dans le quartier du port. Le bâtiment est signé Stefano Boeri.
- objectif général : déployer un affichage géant sur un mur de 36 mètres de long par 12 mètres de haut ;
- contraintes spécifiques : très peu de recul pour disposer des vidéoprojecteurs, et une luminosité ambiante très importante à prendre en compte – des contraintes budgétaires empêchant par ailleurs une solution à base d’écrans ;
- cahier des charges éditorial : diffuser un contenu abondant, en renouvellement constant ;
- directives d’exploitation : le dispositif doit être gérable par des personnels dont les compétences techniques sont celles d’un webmaster (pas de technicien de montage disponible).
Le mur en question sépare les étages de bureau (sur la gauche dans la photo) d’un espace ouvert sur 4 niveaux et traversé par un très long escalator liant le rez-de-chaussée au dernier niveau. Nous avons choisi de couvrir 24 mètres sur 8, obtenant donc un écran d’un ratio de 3/1 s’accrochant visuellement aux repères intrinsèques de l’espace – c’est une mise en page du mur :
Des simulations d’intégration réalisées par ETC sont visibles ici.
Les 4 gros projecteurs Christie sont suspendus en haut à gauche par rapport à cette représentation. Ils sont asservis par paires à un ordinateur maître qui traite l’image en temps réel pour gérer l’anamorphose et le chevauchement flou. Ces ordinateurs reçoivent leur signal vidéo d’une seule machine qui génère l’image globale (environ 2 x HD) en temps réel et la répartit sur 2 cartes graphiques. Le moteur de compositing est un exécutable Flash assisté de modules Max MSP.
Un autre ordinateur gère la composition des programmes à partir d’un système de règles génératives éditables qu’on assemble par plages sur la grille de diffusion. Le choix des contenus se fait soit de manière directive soit par une logique aléatoire pondérable reposant sur la catégorisation des contenus au moment de leur saisie. Le flux des vidéos proposées est automatiquement structuré en programmes avec jingles et ponctuations diverses. Le module d’administration est accessible depuis tous les postes du réseau interne de la Villa et il est riche de nombreuses fonctionnalités permettant de simplifier les tâches de saisie, de programmation et de réglages, notamment sur les enjeux récurrents.
Le schéma opérationnel du système est visible ici.
Le format de l’écran permet de flanquer l’image de la vidéo principale (le plus souvent en 4/3 ou en 16/9) de marges affichant le cartel de la diffusion en cours ainsi que, en format réduit, les vidéos à venir. La charte graphique, véritable habillage de chaîne avec transitions calculées à la volée, décline toutes ces possibilités – dont certaines sont illustrées ici.
Enfin des modules spécifiques ont été ajoutés permettant l’affichage de webcams, d’un flux twitter, de citations, etc. Des artistes intégrés au projet ont aussi réalisé au format plein écran (3/1) des œuvres vidéo, des animations, une météo animée reflétant toutes les températures du pourtour méditerranéen, une séquence d’introduction aux différents lieux de la Villa, etc.
On accède ici à une interview de Céline Jouenne (directrice Videospread) à ce sujet, donnée à Design the future now.
Debrief
Ce qui m’a particulièrement intéressé dans ce projet c’est l’opportunité, rare, d’utiliser pleinement d’une part mon expérience de directeur de création pour encadrer la conception visuelle, le choix des intervenants et les réalisations spécifiques, et d’autre part ma maîtrise de l’ingénierie informatique pour mettre au point les spécifications du système inédit de collecte, d’édition, de génération et de rendu établissant la chaîne de production entre les intervenants et l’image projetée. C’est la convergence de ces deux pratiques qui m’a permis de concevoir le dispositif global.
Depuis, un accident électrique à la Villa a malheureusement endommagé 2 projecteurs qui ont dû partir en réparation. A leur retour la vocation de l’institution avait été modifiée et, à l’heure actuelle, il n’est pas sûr que la projection soit remise en place
Equipe
conception, direction de création et production exécutive : Pierre Lavoie | design graphique : Pablo Segnini | artistes intervenants : Eric Bernaud, Claude Delafosse, Valéry Faidherbe, Pablo Segnini | développement administration et génération : Oussama Mubarak | développement compositing : Blue Yeti | matériels et intégration : ETC | suivi de production : Céline Jouenne
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Bank Al-Maghrib
Projet
Le musée de Bank Al-Maghrib, la Banque centrale du Maroc, est au centre de Rabat. Il comprend des collections de monnaies anciennes et d’œuvres d’art. La rénovation du bâtiment a été confiée à l’architecte Aziz Lazrak tandis que Philippe Délis a été chargé de la scénographie. Relativement tôt dans le projet on m’a demandé d’élaborer le concept de la scénographie numérique, que j’ai pu développer et mener à son terme en tandem avec Philippe, illustrant la logique d’une scénographie bicéphale dont je parle par ailleurs ici.
La scéno numérique sert plusieurs fonctons :
- vitrines interactives permettant de manipuler à grande échelle des séries de pièces numismatiques précieuses ;
- développement pédagogique et ludique multiple sur la nature et le fonctionnement d’une banque centrale ;
- jeu de fausse monnaie sur la fabrication des billets ;
- dispositif identitaire sur l’organisation de la Banque et ses activités en temps réel ;
- répertoire documentaire et ludique multipostes couvrant la totalité des œuvres d’art exposées.
Voir un extrait du design graphique de ce projet, ici, et une visite de chantier là :
…ainsi qu’une démonstration de certains interactifs au moment de l’ouverture du musée :
[vidéos Oussama Mubarak]
Debrief
Au moment de formuler mes propositions rien n’était encore prévu et l’articulation de l’espace a pu évoluer en prenant en compte mon projet de scénographie numérique.
Au final, le résultat offre une grande cohérence et l’interpénétration des traitements physique, audiovisuel et interactif se fait sans couture, malgré l’hétérogénéité des technologies sous-jacentes : le fond des écrans interactifs est raccord avec la texture graphique du mur auquel ils sont accrochés ; la charte graphique est unifiée entre graphisme, vidéo et interactifs ; les vidéos se prolongent sur les écrans des interactifs quand ils sont en veille, parfaitement synchronisées…
Je savais que c’était la bonne façon de procéder mais, compte tenu du montage traditionnel des projets scénographiques notamment en France, je n’avais jamais eu l’occasion d’en vérifier l’hypothèse dans un grand projet : c’est désormais chose faite.
Equipe
scénographie spatiale : Philippe Délis | scénographie numérique : Pierre Lavoie | design graphique : Stéphane Jassin, Laure Dorin, Béatrice Lartigue | direction de projet : Florence Castaing, Pauline Gomy, Lucile Colombain | direction technique : Emmanuel Méhois | développement : Cyrille Cartot, Olivier Gomel, Cédric Houvenagel, Oussama Mubarak
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Museon Arlaten
Projet
Le Museon Arlaten, musée d’arts et traditions populaires arlésien datant du début du siècle dernier, est fermé depuis 2008 pour rénovation. C’est le cabinet d’architectes nantais Tetrarc, sous la direction de Michel Bertreux, qui a remporté ce marché.
Le projet architectural intègre les matériels informatiques et audiovisuels d’un parcours numérique mais, au moment d’aborder le projet détaillé, l’articulation éditoriale des contenus destinés à ces matériels n’était toujours pas définie. Afin de pouvoir infléchir les décisions d’aménagement en fonction des objectifs de ce parcours, on m’a donc demandé de me joindre à l’équipe du musée pour le développer.
Depuis, nous avons identifié une large palette d’applications distinctes, que j’ai prototypées et dont nous avons défini le cahier des charges en matière de contenu et de réalisation. Moyennant quelques aménagements au projet d’architecture, nous sommes désormais assurés d’une parfaite imbrication entre les aspects éditoriaux et matériels de l’offre audiovisuelle et interactive du musée, en prenant notamment en compte les ressources humaines disponibles.
Statut : En août 2019, tous les marchés ont été attribués et sont en cours de réalisation. La réouverture est prévue pour mars 2020.
(Projet en cours dont les visuels restent confidentiels.)
Debrief
C’est la première fois que j’ai l’occasion de pousser à ce point la conception numérique globale en amont de la réalisation, et je m’en félicite. Tout le temps dédié à la mise au point de cet ensemble de dispositifs complémentaires est largement récompensé par la qualité du projet et l’allègement de la charge de décryptage éditorial (intentions et contenus) pour les réalisateurs. Les marchés sont structurés de manière à laisser une large part de créativité aux entreprises, mais ils sont suffisamment aboutis, justement, pour qu’elles sachent exactement à quoi s’en tenir quant au périmètre et aux attentes de la mission – ce qui devrait les changer.
Contrairement aux consultations habituelles qui se font sur un cahier des charges minimal et forcent les candidats à improviser leurs propositions sur un mode probabiliste, nous aurons ici des offres idéalement cadrées et des coûts parfaitement ajustés au projet – voir ce passage de notre méthode à ce sujet. Là encore la métaphore de l’architecte est pertinente : avant de confier les intentions aux entreprises de mise en œuvre, il faut qu’une intelligence experte définisse les orientations et en assure la formulation puis la réalisation fidèle.
Equipe
assistant à maîtrise d’ouvrage : Pierre Lavoie
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Musées départementaux des Alpes de Haute-Provence
Projet
Le département des Alpes de Haute-Provence comprend plusieurs musées dont deux qui sont directement sous la responsabilité du Département : le musée de la préhistoire, à Quinson, et le musée de Salagon, essentiellement dédié à l’ethnobotanique mais touchant aussi l’art contemporain et les pratiques traditionnelles.
Ces deux musées disposaient de matériels différents, obsolètes et déficients pour offrir un parcours audioguidé. Ma mission consistait à faire l’état des lieux, à préfigurer les besoins en matière d’assistance de visite personnelle, à rédiger la consultation pour les matériels, à participer à la sélection des entreprises et à accompagner le projet jusqu’à la mise en place finale.
Il fallait donc développer une solution qui conviendrait à chacun des musées, dont les vocations et les fonctionnements sont très différentes. La démarche était aussi particulière en cela que les enjeux de contenu n’avaient pas du tout été abordés, et ne faisaient pas partie du marché.
J’ai donc quand même dû travailler avec les équipes pour identifier les pistes de propositions éditoriales les plus probables et les plus efficaces, afin d’en extraire un jeu de fonctionnalités de base qui permettraient de réaliser la grande majorité des intentions possibles. C’est sur cette base que j’ai établi le cahier des charges de la consultation pour un compagnon de visite avec écran tactile, de la taille d’un smartphone.
Le projet comportait une autre donnée structurante, concernant exclusivement le musée de Quinson : des vidéos y sont diffusées en boucle sans bande son ambiante (ou dans une langue qui n’est pas nécessairement celle du visiteur) et ces assistants devaient pouvoir diffuser une bande son synchronisée pour chacun de ces flux vidéos. Cette problématique nécessitait une mise en place particulière à la fois matérielle et logicielle.
Pour ce type de dispositifs nous sommes aujourd’hui sur la fin du règne des audioguides propriétaires, qui enfermaient les clients dans une logique unique dont ils étaient l’otage pour toute évolution, souvent même pour toute modification de contenu. L’avènement des matériels grand public que toute société de développement peut transformer en guide de visite a obligé les opérateurs historiques à revoir leur stratégie commerciale et à ouvrir (dans une certaine mesure) leur plate-forme. L’ouverture des solutions matérielle et logicielle était d’ailleurs un critère important de la consultation.
Au moment de la mise en service, la solution était opérationnelle mais les fonctionnalités de localisation (intérieure par BLE et extérieure par GPS) faisaient toujours l’objet de réglages pour en améliorer la performance. Je reste d’ailleurs assez sceptique, à ce jour, sur le réel potentiel (en l’état de la technologie) de ces aides à la navigation en milieu restreint.
Debrief
Les administrations sont souvent bridées dans leur fonctionnement par toutes sortes de contingences incontournables qui leur rendent la logique la plus élémentaire inaccessible. C’est ainsi qu’on peut comprendre l’inexplicable déphasage entre le matériel et le contenu, ici. On arrive à pallier mais ce n’est vraiment pas idéal – et il faut autant que possible l’éviter.
On arrive quand même au final à une solution évolutive, performante, et qui permettra à chacun des musées de contrôler l’évolution de ses contenus de manière souple et créative, en parfaite adéquation avec le déploiement des installations in situ.
Equipe
assistant à maîtrise d’ouvrage : Pierre Lavoie